Nous avions analysé le sujet du train communicant il y a quelques mois, en raison du potentiel d’optimisation des coûts et d’amélioration des services qu’il représente pour les entreprises ferroviaires. Depuis, les expériences grandeur nature se sont multipliées. Mais le train communicant apporte-t-il autant d’avantages que ce qui a été imaginé ? Ses apports métiers sont-ils véritablement tangibles et porteurs de valeur ajoutée ?

Des applications concrètes…

Le train communicant désigne un train qui serait capable de recevoir et de renvoyer de l’information pertinente à différentes typologies d’acteurs en temps réel et de façon automatique. Derrière cette définition se cachent ainsi de nombreuses applications pratiques, qui s’adressent aussi bien aux agents d’une entreprise ferroviaire qu’à des voyageurs.

Par exemple, tout l’enjeu de la gestion des zones à haute densité se trouve dans la régulation du trafic. La mise en place d’une communication automatique entre les trains permettrait de proposer au conducteur la vitesse la plus adaptée pour fluidifier le trafic ferroviaire.

Les possibilités du train communicant permettent d’imaginer d’autres usages à l’adresse du personnel à bord, comme un système de vidéo-surveillance qui serait également accessible au personnel au sol.

Dans le domaine du fret, CFF et Bosch Engineering proposent un train connecté permettant de géolocaliser la marchandise transportée afin d’optimiser ses coûts logistiques.

Enfin, la présence d’un télédiagnostic sur un train servirait grandement la maintenance, qui serait ainsi en mesure de mettre en place des processus prédictifs plus précis, et d’intervenir plus rapidement en cas de panne.

… Mais au prix de coûts financiers importants

Cependant, malgré l’intérêt de ces applications, l’installation nécessaire à leur bon fonctionnement demande un coût financier important.

En effet, la mise en place d’un train communicant nécessite trois briques fonctionnelles :

  • l’installation d’un matériel embarqué (équipement de communication, capteurs pour diagnostiquer l’état d’une motrice, capteurs infrarouges pour compter le nombre de voyageurs…),
  • un réseau internet performant à bord,
  • et un système d’information adapté, en mesure de recevoir, traiter et redistribuer l’information reçue.

La popularité des smartphones rend aujourd’hui quasiment caduque la mise à disposition d’une connectivité internet pour le voyageur et pour le personnel. L’expérience voyageur se vit aujourd’hui via l’écran d’une tablette ou d’un smartphone, et commence avant le début du trajet. Aujourd’hui, certaines alternatives remplacent même des applications pour les voyageurs sans utiliser de dispositifs lourds comme le train communicant. Tranquilien, par exemple, permet d’évaluer le nombre de voyageurs dans une rame de façon fiable, grâce à une collecte de l’information collaborative. Les voyageurs peuvent de cette manière anticiper leur placement dans les rames des trains afin de se répartir au mieux.

Le coût induit par le remplacement d’un matériel ferroviaire conséquent qui n’est pas adapté à ces installations apparaît prohibitif. Il serait donc préférable de profiter d’un renouvellement de flotte pour bénéficier des technologies les plus adaptées aux usages souhaités selon les différentes problématiques du territoire (plus ou moins densément peuplé, sur des distances plus ou moins longues, urbain ou rural…). L’émergence des objets connectés et de systèmes embarqués permet d’envisager de nouvelles formes de connectivité via le machine to machine par exemple.

Parmi les multiples applications possibles, laquelle privilégier ?

Le coût d’un tel matériel incite à privilégier en priorité les applications les plus créatrices de valeur. Le train communicant contribue à l’amélioration de deux grands types de valeurs : la qualité de service et la sécurité. Si  l’amélioration de l’information voyageurs et des services à bord via le comptage de voyageurs représentent des « petits plus » indéniables, l’amélioration du diagnostic du matériel permettrait véritablement de créer de la valeur sur ces deux aspects. Elle améliorerait la sécurité par une maintenance plus ciblée et plus prédictive, et servirait la qualité de service dans un second temps, grâce à la diminution des pannes, ce qui permettrait de garantir une meilleure ponctualité des trains. Les sujets relatifs à la production (maintenance, gestion de la circulation), bien que prospectifs, seraient les premiers bénéficiaires de l’installation de dispositifs de trains communicants.

Pour l’heure, le train communicant n’offre pas encore de révolution : en effet, il n’entraîne aucune modification du modèle économique actuel des entreprises ferroviaires. Cependant, avec la libéralisation progressive du secteur, il pourrait constituer un avantage concurrentiel grâce à la fluidification de la circulation de l’information qu’il permet.