La Commission de Régulation de l’Energie prend position dans le débat sur la « mise en données » du monde de l’énergie

Le monde vit un « déluge de données ». Passé un peu inaperçu dans la période électorale pré-estivale, le « Rapport du comité d’études relatif aux données dont disposent les gestionnaires de réseaux et d’infrastructures d’énergie » réalisé par la Commission de Régulation de l’énergie et publié en mai dernier, rappelle la réalité dès les première lignes : « le volume global de données produit double tous les 24 mois ». Avec l’instrumentation grandissante des réseaux, le déploiement des compteurs communicants et le potentiel offert par le Big Data, le monde de l’énergie se digitalise à grande vitesse et crée un volume exponentiel de données. Avec Linky, le gestionnaire de réseau d’électricité Enedis va voir son nombre de données collectées multiplié par 5000 d’ici 5 ans. Le transporteur GRTgaz indique, quant à lui, qu’il recueille 28 millions de données sur son réseau chaque jour.

Cette évolution vient perturber le monde de l’énergie et le fonctionnement de ses acteurs. Si le potentiel est énorme, des zones de flou subsistent. En forme de testament car quelques semaines seulement avant son départ de la CRE, celui qui en était encore commissaire, Yann Padova, grand spécialiste de la question, formalise 15 recommandations visant à clarifier les rôles et faire des données des gestionnaires de réseaux un vivier de qualité pouvant être exploité et échangé de manière cohérente. Pour fluidifier les échanges et les sécuriser, elle préconise les conditions de création du modèle de plate-forme adapté, et en questionne la gouvernance.

La donnée, objet de toutes les attentions, en particulier celle du législateur

Afin de s’appuyer sur une vision concrète des données produites dans les réseaux, la CRE dresse en premier lieu une cartographie exhaustive des données énergétiques et de la réglementation encadrant leur mise à disposition. Un préalable nécessaire car les données produites dans les réseaux d’électricité et de gaz sont très variées et collectées à plusieurs échelles (IRIS , bâtiment, collectivités, EPCI2, consommateur etc.). Une multitude d’acteurs s’échangent des données (gestionnaires de réseaux, producteurs, consommateurs, fournisseurs, agrégateurs, collectivités territoriales, grand public etc.). La CRE souligne à ce sujet le besoin de « veiller à la cohérence des informations (…) au regard en particulier de la multiplicité des canaux d’accès » pour une même donnée. Les gestionnaires de réseaux multiplient en effet les initiatives d’open-data et mettent à disposition des données sécurisées sur leurs sites à destination des consommateurs, des fournisseurs ou encore des collectivités.  La CRE recommande donc de fournir des données de qualité, harmonisées et collectées par des équipements interopérables. C’est le cas par exemple du distributeur néerlandais Elering, à l’origine de la création de Estfeed : une plateforme de données commune aux différents acteurs énergéticiens et consommateurs.

Le développement et la mise à disposition des données s’est aussi accrue grâce à un cadre législatif national et européen porteur de « réelles avancées » favorisant l’ouverture et l’innovation. Pas moins de quatre textes de nature législative sont intervenus en France ces dernières années, 6 arrêtés publiés ou en passe de l’être, 8 décrets et au niveau européen deux textes de loi importants. Ce qui peut être vu comme une manière de donner un cadre et d’encourager le partage et la valorisation des données peut aussi comporter le risque d’une confusion, voire d’incohérences entre les dispositifs. RTE souligne toutefois un risque de « constitution d’un mille-feuille réglementaire » au vu des standards de publication qui diffèrent pour chaque réglementation. La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte du 17 août 2015 renforce ainsi l’accès à des données agrégées à l’année et collectées à une échelle fine pour les collectivités territoriales et également pour le public lorsque cela est possible.

Les données, au cœur de la stratégie des acteurs de l’énergie

La concurrence sur le marché de l’énergie s’accroit avec l’explosion des données : de nouveaux acteurs de secteurs variés pénètrent le marché (start-up proposant des services autour des données, assurances, opérateurs télécoms etc.). A ceux-ci s’ajoutent des fournisseurs d’énergie enclins à proposer des nouveaux services à forte valeur ajoutée pour les clients (pilotage à distance des consommation, aide à la maîtrise d’énergie, défis d’économie d’énergie etc.). Les données des gestionnaires de réseaux, et notamment la « courbe de charge » profilant la consommation d’un utilisateur,

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