Retour sur le Forum de la Transition Energétique (FTE) animée par Les Echos Events

Philippe Monloubou

Philippe Monloubou

Président du directoire d'Enedis

Ce qu’a apporté la COP21, c’est le transfert à la société civile de la responsabilité de la transition énergétique.

Les intercommunalités ont acquis des responsabilités quant à la lutte contre le réchauffement climatique. Pour les plus grandes, ce rôle d’acteur responsable se traduit par l’obligation de rédiger un Plan Climat. Comment les différents acteurs de la société civile peuvent soutenir les intercommunalités dans leurs actions ?

L’édition 2018 du Forum de la Transition Energétique (FTE) animée par Les Echos a été l’occasion de réunir la société civile locale de la transition énergétique, à savoir les entreprises (ENEDIS), les territoires (la région Île-de-France et la métropole lyonnaise), les syndicats (SyDev), et les citoyens représentés par Jean-Baptiste Blondel. Un bon cocktail pour comprendre comment la transition énergétique est portée au niveau local et pour avoir une meilleure vision des évolutions énergétiques locales à venir.

Le rôle de chef de file de la région

Jean-Philippe Dugoin-Clément, Vice-Président de la Région Île-de-France, commence par rappeler la situation particulière de sa région, avec une région-métropole mondiale et de fortes disparités au sein de son territoire (Paris intramuros, zone dense et zone non dense). Le nouveau Plan Climat parisien est en cours d’élaboration et devrait s’appuyer notamment sur deux axes stratégiques, la sobriété énergétique et la diminution des imports énergétiques. Mais le rôle de la région est celui d’un chef de file et non d’un donneur d’ordre ! Son rôle est donc partagé entre la fédération des collectivités derrière des ambitions communes et du lobbying auprès des grandes instances étatiques.

Des métropoles aux positions disparates

Les métropoles françaises ne choisissent pas toutes d’endosser le même rôle. Et a contrario de la situation parisienne, la métropole lyonnaise a un rôle fort avec des compétences en matière de réseau de gaz et de l’électricité, etc… Constat partagé par l’ensemble des acteurs de la table ronde ! Roland Crimier, Vice-Président de la Métropole lyonnaise, explique que le bon échelon de la transition énergétique dans la région rhodanienne est la métropole car elle réunit la gestion des énergies et les compétences nécessaires. C’est aussi l’occasion pour rappeler les grands axes du Plan Climat voté en 2012 à savoir la mobilité douce et l’action écoréno’v (relative à la consommation des bâtiments).

Le 3ème acteur : les syndicats de l’énergie

Les syndicats de l’énergie ont un rôle technique (capacité d’ingénierie et maintenance), compétences sur lesquelles peuvent s’appuyer les régions ou les métropoles. Pour autant, généraliser le rôle des syndicats est voué à l’échec. A Lyon, le syndicat local, le SIGERLy, a été intégré à la métropole. Au contraire, le rôle des syndicats parisiens et vendéens fait d’eux des acteurs incontournables de la transition énergétique malgré le contraste évident entre leur territoire. Ils coordonnent et fédèrent les différents acteurs, autant privés que publics, de leur territoire afin d’apporter de la cohérence aux actions tout en respectant les spécificités de chacun. Experts ensuite, ils apportent leur savoir et leur expérience afin d’aider les intercommunalités à rédiger leur Plan Climat. Enfin, amorceurs avec une vision, ils portent des initiatives et des convictions. Le SyDEV, comme l’explique sa Vice-Présidente, Isabelle Doat, a porté un certain nombre d’actions relatives à la transition énergétique (efficacité énergétique des bâtiments, développement des véhicules électriques et des énergies renouvelables, le projet départemental Smart Grid Vendée, …).

Les entreprises en soutien des territoires

Dans ce contexte et de par l’émergence de LINKY, ENEDIS devient gestionnaire de données et se doit de partager ces données avec les territoires. L’accessibilité et la maîtrise de ces données sont des atouts fondamentaux à la rédaction et au pilotage des Plans Climat. Par exemple à Brest, la maîtrise de ces données a permis d’identifier les bâtiments énergivores et de prévoir des plans de rénovation en fonction.

Comment repositionner le citoyen au cœur de la transition énergétique ?

Nicolas Hulot, qui a ouvert l’édition 2018 du Forum, rappelait sa conviction sur ce « grand moment démocratique » que doit être la transition énergétique du XXIème siècle1. Pourtant, force est de constater que les français se sentent encore peu concernés par les questions énergétiques, voire ne maitrisent que très partiellement le sujet. Jean Baptiste Blondel, Senior Manager chez Wavestone, a profité de cette table ronde pour proposer trois leviers repositionnant le citoyen au cœur de la transition énergétique.

En premier lieu, le déploiement des compteurs communicants et d’objets connectés dans l’habitat va permettre au citoyen de maîtriser sa consommation et aux fournisseurs de proposer de nouvelles offres de gestion de l’énergie dans l’habitat. En plus d’être un vecteur de transition évident vers les énergies renouvelables, l’autoconsommation permet de sensibiliser le citoyen à la sobriété énergétique. Jean-Baptiste Blondel souligne de façon très pragmatique : « Quand on produit soi-même ce que l’on consomme, on ne gâche pas. » Enfin, l’émergence de coopératives énergétiques locales portées par les citoyens en partenariat avec les collectivités locales, préfigure de nouveaux modèles de production décentralisée de l’énergie, complémentaires au modèle actuel. L’essor des financements participatifs est un premier pas vers cette production financée localement.

Une conclusion partagée ressort de cette table ronde, chaque territoire a ses spécificités, ses contraintes, son histoire, et sa répartition des responsabilités. Pour autant, est partagée une volonté de co-construction afin de faire face collectivement aux enjeux de la transition énergétique. Et cela ne se fera pas sans le citoyen au cœur de la transition énergétique.

 

[Cette publication a été réalisée avec les contributions de Thomas Duvinage et Sylvain Masserot ]