Article publié dans Les Echos le 8 novembre 2023

Plusieurs études récentes développent et analysent les impacts potentiels de l’IA générative sur les métiers du conseil : réduction drastique de nombre de tâches à faible valeur ajoutée (recherche de références, de CV, de contenus de livre blanc…), accélération de certaines tâches d’analyse, de diagnostic ou de benchmark, réponses automatisées à certains types de consultation, réduction du nombre d’analystes, etc.

Certaines de ces évolutions font rêver, d’autres peur. Ce qui est sûr c’est qu’à l’instar des autres industries, les avancées de l’IA générative nous obligent à réinterroger notre proposition de valeur et la place que l’on souhaite donner à l’humain. L’étude Harvard Business School réalisée avec le BCG établit que sur des tâches basiques, les « consultants augmentés » ont traité les tâches 21 % plus vite que les autres et la qualité de leurs résultats est jugée 40 % supérieure aux consultants sans IA.

C’est évidemment beaucoup moins vrai pour certaines tâches complexes et par ailleurs assez variable en fonction des profils mais en tout cas suffisant pour reconnaître un apport réel. Quand on regarde nos journées, il y a effectivement beaucoup de temps « perdu » à accéder à une information (fiable si possible), beaucoup de temps à rédiger des documents où des mails efficaces, mais est-ce vraiment là la valeur ajoutée que le consultant doit apporter ?

Expertise et personnalisation

Qu’attend-on vraiment d’un consultant ? Parfois qu’il permette de comprendre vite une situation, un marché, une technologie où de se comparer à ses pairs ; mais le plus souvent, d’une part qu’il aide l’entreprise à se différencier en capitalisant sur ses actifs et ses collaborateurs et d’autre part qu’il contribue à faire réussir les transformations. Ici, il est peu question d’accès aux informations ou de créativité, mais beaucoup d’expertise, de personnalisation et de conduite du changement.

Sans doute les IA génératives permettront d’aider sur ces trois domaines mais elles n’y seront pas centrales avant longtemps. Sur l’aspect personnalisation, les études confirment l’intuition que les « consultants augmentés » sont certes un peu plus performants mais apportent des réponses beaucoup moins variées. Les clients ont rarement pour objectif de se voir appliquer systématiquement les mêmes recettes que leurs concurrents.

Sur le sujet de l’expertise, qui n’a pas encore été testé, les IA génératives auront beaucoup de mal à proposer des choses réellement opérantes tant les données publiques sur lesquelles elles sont entraînées sont loin des réalités terrain auxquelles est confronté un véritable expert. Elle peut effectivement déjà aider à réparer un grille-pain en en partageant la photo et le problème… mais elle n’aidera pas à savoir identifier la meilleure solution (OpenAI, Open source…) pour un cas d’usage GenAI complexe en intégrant les performances du modèle mais aussi sa frugalité, son explicabilité, son respect des politiques internes sur les données et les algorithmes.

Temps libéré

Enfin sur le sujet de la conduite du changement, l’humain, la coconstruction, la prise en compte de facteurs irrationnels, l’intelligence de situation dont il faut faire preuve sont autant de domaines où l’intelligence humaine conservera son avance encore longtemps. Finalement, et si ce mouvement permettait de trier le bon grain de l’ivraie ?

Prenons l’exemple du conseil en transformation IA générative. Le mauvais consultant lira internet ou utilisera ChatGPT pour identifier des idées de cas d’usages, pour lister les meilleures réponses technologiques et lui demandera de formaliser un plan projet. Le bon consultant, lui, partira des enjeux métier, identifiera quelques pistes réellement souhaitables pour le métier, fera l’effort de comprendre les singularités de processus, de culture et de Système d’information pour proposer des options réalistes.

Il mettra ensuite le gros de son énergie dans l’atterrissage dudit cas d’usage dans les processus métiers, les SI et les mains des utilisateurs. Le temps libéré grâce aux IA génératives lui permettra sans doute d’encore mieux traiter ces dimensions capitales.

En conclusion, comme pour la plupart des industries, et même si cela peut sembler paradoxal, l’IA générative va contribuer à remettre l’humain, l’expertise et les singularités au centre des propositions de valeur, plus que les capacités d’analyse massive ou de génération de contenu et de slides. Est-ce une si mauvaise chose ?

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